Yvette c’est la vieille dame qui vit au 25. Elle est toute
courbée (enfin, je me demande si elle en fait pas un peu trop), elle est
discrète, et visiblement pas en bon état. Mais tout ça, ce n’est pas très important.
Ce qui est important c’est que pour tout le monde, enfin…peut être plus pour
moi que pour tout le monde : Yvette, c’est la salope du quartier. C est la
vieille qui fait chier.
Vous savez, c’est celle qui marche au milieu du trottoir, à
2 à l’heure, limite en déambulatoire, ou avec sa canne, prenant bien toute la
place. C’est celle qui trimbale son caddie partout où elle va, et bien sûr
c’est partout où je vais. C’est celle qui décide d’aller chercher son pain à
midi alors qu’elle a toute la matinée, prenant bien son temps pour demander les
nouvelles de Mme Paule à la boulangère, cherchant désespérément son porte
monnaie au fond du sac, le donnant à la caissière (car elle confond les
pièces), tout en lui, une fois la transaction effectuée, réclamant un demi pain
supplémentaire pour renouveler l’opération. Résultat ? 20 personnes dans
la queue, 10 minutes d’attente. Une caissière énervée, des clients impatients.
Non, mais ! Putainnnnn Yvette, casse-toi de là, tu nous gonfles. Mais Yvette,
elle s’en fout. Elle continue de faire chier, avec son caddie dans la boutique,
jonchée de clients, amassée d’individus, sautillant sur place, râlant de
n’avoir désormais plus que 40 minutes pour acheter le pain, faire bouffer le
môme, ou le mari, c’est selon et retourner vite au travail finaliser cette
ascension professionnelle qui nous oblige à ne plus profiter du quotidien.
Ceci dit, MOI si je croise Yvette le midi, à la boulangerie
du quartier, c’est que je ne travaille pas et donc que j’ai du temps. Mais, elle
me gâche mon temps libre.
Il devrait y avoir une sorte de régulation. Les vieux,
disons de plus de 60 ans, n’auraient le droit de consommer que entre 09 h et 10
heures du matin, et entre 14 et 16 heures. Ou alors de nuit.
Alors, je sais, certains diront que Mme Yvette est seule,
elle s’ennuie et ce petit moment à la boulangerie, c’est sa sortie du jour,
c’est sa manière de rester vivante, de rester connectée au monde…. Grandes âmes
charitables. Mais admettons en effet que pour Yvette c’est pas le top.
Alors dans ce cas, pourquoi ne pas pousser Yvette et tous
les autres vieux à faire les courses pour les gens comme moi, c'est-à-dire les
actifs au repos, mais ayant une vie bien remplie ? Une sorte de service
obligatoire. Les vieux se font chier ? Occupons-les ! Puisque de
toutes façons ils iront à la boulangerie, autant qu’ils ramènent le pain ;
qu’elle ramène mon pain. Je m’imagine, chez moi, à rêvasser sur mon lit,
réfléchissant à comment rédiger correctement un CV, et hop, Ding dong,
- C’est qui ?
- C’est Yvette. Je
viens vous livrer votre croissant.
- Déposez-le devant la porte ! ......... Je vous rembourserai plus tard.
Non bien sûr, je rigole. Il faut bien que je lui donne un
salaire. Cela sera un sourire.
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